Ce titre va faire saliver votre esprit dépravé, mais si ma chronique parle de plaisir, de sexe, de pénétration, de fesses ou de capote, ne vous y trompez pas, cette revue n’est -hélas- pas Playboy et toute licence est exclue.

En effet, je vais parler automobile et plus précisément cabriolet. Depuis fort longtemps, je savais qu’un jour, je roulerais en cabriolet. Pas n’importe quel cabriolet. Le mien serait un petit roadster obligatoirement rouge. N’allez surtout pas imaginer que je rêvais d’une Ferrari. J’ai sûrement tort, mais pour moi, c’est trop gros, trop cher, trop voyant, pas pratique, coûteux à l’entretien et pour tout dire, inutile si ce n’est pour l’égo. Car à moins de posséder une centaine de permis, avoir un tel potentiel et ne pas pouvoir s’en servir est sérieusement frustrant. Mais le rêve n’a pas de prix, et bien sûr qu’une Ferrari -rouge- qu’elle s’appelle Enzo, Berlinetta, California ou même …..Lollo, serait pour 90% des hommes, un fantasme avéré.

Afin de fixer les esprits, mettons tout de suite une chose au point. Un roadster n’est pas un véhicule, une voiture, un engin, voire un moyen de déplacement. C’est tout cela à la fois, mais c’est essentiellement une envie d’anticonformisme, un besoin de singularité et pour tout dire, une certaine idée de la liberté qui se fait extrêmement rare sur les routes comme dans les esprits aujourd’hui. A l’origine, dans les années cinquante, les yankees ont inventé le roadster comme un véhicule destiné à aller le plus vite possible d’un bar à l’autre! L’idée, c’était mettre un gros moteur essence dans un petit châssis, car le secret ne résidait pas dans la puissance, mais dans le rapport poids/puissance. Emotions garanties! Ils ont commencé avec des motos dont la célèbre Harley est l’archétype, et sont passés ensuite aux voitures. Les anglais ont repris l’idée dans les sixties avec une flopée de petits cabriolets sympathiques nommés TR3, TR4, MG ou Spitfire. Aujourd’hui, le principe n’a pas varié: un châssis léger, un moteur essence le plus gros possible, une transmission aux roues arrières et deux places. Coupé ou cabriolet au choix.

Dernièrement, et sans rentrer dans le pourquoi ni le comment, j’ai fondu. Je possède, à moins que ce ne soit elle qui ne me possède, une petite décapotable rouge. La marque importe peu, la ligne est craquante, la dimension pratique, le poids léger, la puissance suffisante, la couleur pompier et le prix raisonnable. Et c’est bien la seule chose de raisonnable dans cette affaire, car je dois le reconnaître, ce petit engin bourré de qualités possède également quelques défauts dus à son concept.
Ne pensez pas un seul instant que c’est facile d’acheter un cabriolet. Il faut dépasser certaines idées préconçues, lutter contre les allusions, mépriser les sarcasmes, dédaigner les critiques.

D’abord, on ne sait pourquoi, une décapotable à une connotation exclusivement masculine qui déchaîne l’ire de la gente féminine. Vieux mythe sans doute du dragueur des films italiens des années 60, on voit rarement de personne du sexe féminin au volant de ce type de véhicules. Ou même dans le baquet passager car elles n’y trouvent que des inconvénients: le siège est trop étroit ou trop bas, le vent les décoiffe, il fait trop chaud ou trop froid, il y a des courants d’air, le bruit empêche la conversation (tant mieux parfois) et les femmes vous regardent.

La deuxième image liée à la décapotable est la jeunesse. Jusqu’à 25 ans, on peut admettre que vous vous baladiez dans un tape-cul voyant. Ce cap franchi, vous passez au mieux pour un sentimental attardé, au pire pour un vieux sadique. Première réflexion de mon épouse: « Tu vas faire vieux beau!« . Ce qui est pour moi une avancée intéressante, avant je ne faisais que vieux! En passant, je remarque qu’on ne dit jamais « vieille belle », mais « vieille peau », c’est quand même moins flatteur!

Donc, une fois fait cette démarche intellectuelle, votre épouse convaincue (ou vaincue), vos enfants enfermés et vos amis écartés, vous allez prendre livraison de la petite merveille. Le vendeur fait son travail, vous complimente de votre achat et après avoir fait d’un coup d’œil expert la liste de vos problèmes vertébraux, vous ouvre la portière avec un petit sourire narquois.
Le premier choc est visuel. La ligne à laquelle on ne peut rester insensible, rappelle furieusement les voitures de course de l’époque bénie où des gentlemen drivers en casquette s’affrontaient sur des circuits à taille humaine. La nostalgie à sa part de responsabilité dans l’affaire.
Passé ce premier émoi, il faut descendre -car on ne monte pas dans un roadster, on y descend- et s’installer dans un baquet conçu pour un conducteur de 25 ans et de 55 kilos. Le toit se situant à 1.20m du sol, j’ai expérimenté trois façons de pénétrer l’engin.

La première consiste à se plier, rentrer le ventre, lancer les fesses, se laisser tomber (ouille!) et ramener les jambes. Faisable.

Pour la seconde, il faut s’accrocher en haut du pare-brise, rentrer la jambe droite, poser les fesses et rentrer l’autre jambe. Souplesse obligatoire.

Quant à la troisième, façon play-boy amerloque, il suffit de sauter par-dessus la portière! La plupart du temps, vous vous retrouverez avec la poignée du frein à main enfoncée dans le fondement, mais vous aurez eu votre instant de gloire.

Une fois vos vertèbres tassées et votre sciatique bien réveillée, vous vous découvrez allongé dans un environnement étroit où tout est à portée de main. Vous avez les fesses à vingt centimètres du bitume et la tête contre le toit. Un petit volant vertical gainé de cuir qui vous connecte à la route, un minuscule levier de vitesse qui vous annonce qu’il y a six vitesses et qu’il est d’accord pour les changer, un baquet qui maintient fermement vos bourrelets, un pédalier alu au fond d’un tunnel où disparaissent vos jambes et des compteurs gradués de chiffres prohibés.

Toute cette panoplie ne laisse pas place au doute: vous êtes bien dans une voiture de sport.

Les essuie-glaces balayent à trente centimètres de votre nez, le rétro rétrovise pratiquement sur votre front,, le volant tape dans vos genoux et votre coude droit racle sur le frein à main. Vous ne voyez ni l’avant, ni l’arrière de l’engin et le fait de mettre la ceinture devient un exercice de yoga. De plus, une haute console coupe la voiture en deux. Car il est évident que tout roadster qui se respecte ne peut comporter que deux places. Et encore, la conduite de ce genre d’engin étant un plaisir solitaire, la deuxième place est souvent vide ou occupée par le sac qui ne rentre pas dans un coffre plutôt symbolique. Mais vous n’avez pas acquis ce cabriolet pour trimbaler belle-mamie et votre saint-bernard, non?
Le sourire imbécile du vendeur s’est élargi et vous reviennent en mémoire les avertissements des bons copains. Vous vous dites intérieurement: « Qu’ai-je fait? ». Comme il faut bien assumer vos choix, vous tournez la clé et le grondement sportif de l’échappement allié à la vivacité de la réponse de l’accélérateur, ramène un sourire sur votre visage tendu. Après une grimace hypocrite au vendeur, vous sortez de la concession sans savoir alors que vous ne serez plus jamais le même. Vous démarrez lentement pour vous intégrer à la circulation et là première surprise: on vous laisse le passage. Les bus vous font signe de la main, les camions lèvent le pouce et même les taxis vous octroient la priorité! Les femmes se retournent en souriant sur votre passage et les hommes ont une grimace de jalousie qui vous ravit. Un indéniable capital sympathie vous accompagne. Deuxième surprise: la couleur rouge, peu appréciée dans nos contrées, se voit de loin et vous évite quelques surprises. Il vaut mieux d’ailleurs, car à mi-portière d’un banal 4×4, vous avez tendance à disparaître de l’horizon des autres usagers.

Mais une décapotable, par définition, doit se conduire décapotée ou vous achetez une berline. Vient donc le moment où vous appuyez sur le bouton d’ouverture électrique du toit. Dix secondes après, la magie opère et vous êtes dans un autre monde. L’horizon s’élargit, le ciel s’offre à vous et soudainement vous respirez mieux. En plus, la sono sonne méchant. « Crazy mama » de J.J. Cale au ralenti, « Gimme some loving » de Spencer Davis Group à 4000 tours et »Road house blues » de Status Quos en pleine zone rouge, sont des moments qui vous réconcilient avec le monde.

Malgré sa légende, un roadster aime aussi les grands espaces et pour faire le plein de sensations, il faut s’évader de la jungle urbaine. Vous sortez donc de l’agglomération et là, tout change. Car, à la première accélération, on lui pardonne tout. Le tableau de bord pourrait être en peau de saucisson et les sièges en jute qu’on l’aimerait encore. Une simple poussée du pied droit vous projette instantanément sur la voiture qui se traîne devant vous et vous comprenez qu’il va vous falloir revoir vos notions de conduite car les sensations sont décuplées. Chaque montée en régime fait chanter l’échappement, vous pousse à accélérer et vous ne conduisez plus, vous pilotez. La route rétrécit, chaque virage vous saute à la figure et votre taux d’adrénaline tressaute de la même façon. Le petit bolide propose une belle précision de direction et se cale sur la trajectoire. Vous la jetez de courbes en courbes et elle vous catapulte façon lance-pierre. Au pire, si vous vous laissez déborder par l’enthousiasme, son popotin vous prévient d’un écart éventuel. Inutile quand même d’exploser les radars, à cent à l’heure, les impressions sont déjà là. Le confort, que l’on pouvait craindre dégradé vu le faible débattement des suspensions, est étonnamment bon.
Et en plus, comme en moto, il y a l’odeur que la climatisation vous avez fait oublier. Traverser une forêt redevient une expérience olfactive. Un champ de purin aussi d’ailleurs! Mais bien calé dans le baquet, les cheveux dans le vent, vous affichez un sourire niais. Le bonheur, ça peut être simple comme un cabriolet.

Néanmoins, une fois revenu sur terre, je ne peux passer sous silence deux inconvénients concernant des habitudes assez répandues. Une fois décapoté et au vu de tout le monde, vous ne pouvez ni téléphoner, ni mettre vos doigts au chaud dans votre nez. Ou dans celui de votre voisin si celui-ci est particulièrement aimable. Ces précisons vont certainement faire chuter les ventes de 50%, mais si vous ne pouvez faire l’impasse sur ces usages, vous pouvez toujours recapoter! Ou revendre la merveille pour vous acheter une grosse berline noire qui vous donnera l’air sérieux et flattera votre tout à l’égo. Pauvre de vous.

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